LES FLEURS DU GALL - XXVII UN NOUNOURS
Rappelez-vous l’objet que nous vîmes, Nounours,
Ce beau matin d’été si doux :
Qu’il vienne me chercher, mon joli nounours
Sur un lit semé de cailloux,
Les jambes en l’air, toi le confident De mon cœur d’enfant
Nounours, ce soir j’attendais d’une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d’exhalaisons.
Le soleil rayonnait Nounours, tu sembles étonné
De me voir pleurer
Viens me consoler à la grande Nature
Bête, bête, bête qu’ensemble elle avait joint ;
Et le ciel regardait, Nounours, ce garçon que j’aime
Comme une fleur s’épanouir.
La puanteur était si forte, Il m’a embrassé m’a juré qu’il m’aime,
Vous crûtes vous évanouir.
Et même, je peux te l’avouer sur ce ventre putride,
D’où sortaient, faut pas me gronder
Nounours, mon joli nounours, comme un épais liquide
Tout est arrangé tout est changé
Tout cela descendait, montait comme une vague,
Ou s’élançait dans ce beau voyage
On eût dit que le corps, enflé d’un souffle vague,
Vivait très très très très sage
Et si tu es sage une étrange musique,
Comme l’eau courante et le vent,
Il veut m’épouser dans quelques années d’un mouvement rythmique
Je t’emmènerai dans son van.
[…]
Charles Baudelaire & France Gall : Une Charogne & Nounours
Comments