Tout premier Baiser
Quand ton col de couleur rose Se donne à mon embrassement Ah des gouttes salées ont déchiré doucement L’étrange pâleur d’une paupière à demi close,
Ah, mon âme pourquoi ces mots Si forts, si chauds Te font l’effet d’un couteau : La force d’un si grand plaisir.
Puis, quand s’approche de la tienne Ma lèvre, un sourire qui soulage, Que la fleur recueillir je puis De [ta] voix sans image,
Quand le soupir de ces odeurs Où nos deux langues qui se jouent Qu'ils gémissaient sur ta peau et nouent, Un refrain qui voudrait crier mes douces ardeurs,
« Toute première fois Ah-avec les dieux, tant je suis heureux, Et boire à longs traits savoureux Leur doux breuvage [pour la] toute toute première fois. »
Si tes mains ne servent qu’à fumer Ah lèvres séchées, gorge nouée Pourquoi me permets-tu, maîtresse, Un jeu mêlé de souffrance ?
As-tu peur que la jouissance D’un si grand heur trouble ton innocence Et que sans toi je vole dans le silence D’éternelle réjouissance?
Belle comme un guerrier, n’aie peur de cela, Partout où se cache dans son rêve Mon ciel sans cesse continue le combat Et mon paradis sera comme la toute première fois.
Toute toute première fois…
Jeanne Du Bellay (1542-1994)
Avec les textes de «Baiser» de Joachim Du Bellay
& «Toute première fois» de Jeanne Mas
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